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Les-bains

Impression numérique
Année : 2023

La quasi-totalité des lagons de l’île sont situés le long de la côte occidentale, dans une zone englobée par la réserve naturelle marine de La Réunion. C’est là que l’on retrouve les plages de sable blanc et les volumes de précipitations les moins élevés de l’île. Les nuages et la pluie viennent donc rarement gâcher l’atmosphère de station balnéaire qui y règne, ainsi que les représentations qui y sont associées.

Pourtant, cette région est aussi au cœur de tensions que ces airs de vacances perpétuelles ne suffisent pas à apaiser. L’interface terre-mer que trace la ligne de côte est l’objet d’enjeux qui l’assimilent parfois à une frontière disputée. S’y confrontent régulièrement et de manière binaire les intérêts de la croissance urbaine et de la préservation des milieux naturels, résidents et usagers, espaces publics et privés, requins et êtres humains, zorèy et kréol.

La première carte aborde ces sujets de division par le biais d’un agrément dispendieux bien que commun le long de ce littoral : la piscine privée. Marqueur d’un certain capital économique, sa « cartographisation » permet d’esquisser les inégalités socio-spatiales à l’œuvre sur le territoire, et d’illustrer avec une pointe d’humour l’incongruité de l’aménagement de ces masses d’eau sur un bord de mer déjà occupé.

Face à elle, la seconde carte nous projette dans un futur hypothétique, mais non moins plausible, où les changements climatiques auront eu raison de la fallacieuse invariabilité de ces activités estivales : la ligne de côte a reculé face à l’élévation du niveau de la mer et aux inondations, les zones de baignade sécurisées sont devenues des environnements hostiles à notre espèce, et aucune des piscines n’a finalement résisté à la brutalité des pénuries d’eau potable.

Construit comme une étude diachronique et pensé à la manière d’une fable, ce diptyque invite à la réflexion sur les incidences de nos alliances et de nos divisions sur la course de cette île que nous partageons comme un vaisseau. La démarche paraît toutefois contre-productive en un lieu que l’on associe justement à la détente et à l’insouciance. Qui de nous vivra de toute façon assez longtemps pour assister à cette désolation ?

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